Homélie du 5ème dimanche de carême

 

 

 

En ce cinquième dimanche de carême, à l’heure où l’ hommage de la nation salue l’engagement de tous les soignants en écho au décompte macabre des victimes du coronavirus, l’évangile offre à notre contemplation la figure du Christ confronté à la mort de son ami Lazare.

 Mystère de l’Incarnation, partageant le sort de notre humanité, Jésus, lui aussi, est confronté à la mort et à l’incompréhension de ses proches. Sa réponse immédiate a de quoi surprendre : « Cette mort est pour que la Gloire de Dieu se manifeste ». Mais, attention au contresens. Pour Jésus, ce n’est pas la mort en général qui serait signe de la Gloire et de la toute-puissance d’un Dieu qui jouerait avec la  vie des hommes. Non, mais bien « cette mort » celle de Lazare comme si Jésus annonçait à ses disciples ce qu’il s’apprêtait à accomplir. Arrivé à Béthanie, Jésus est, d’abord, confronté à l’incompréhension bien légitime de ses proches. Deux fois de suite, c’est le même constat : « Seigneur, si tu avais été là ! ». Combien de fois notre prière se résume à cet appel lancé au Seigneur ? « Si il y avait un Dieu il n’y aurait pas tant de malheurs ! » ; « Si Dieu est tout puissant comment peut-il tolérer tant  de souffrance ? ». Là encore, la question de Jésus est déroutante. Il s’enquiert du lieu où repose le corps de son ami. Et, là  encore, la réaction est bien habituelle et résonne comme une évidence : « Mais, enfin, il sent déjà ! ». Pour eux, la mort a gagné, elle a toujours le dernier mot. Jésus, lui, ne peut se satisfaire de cette évidence. C’est un peu comme s’il nous disait « Quels repères, quelle dimension, quelle limites donnez vous à votre humanité, à votre vie, à votre existence ? ». Jésus se rend alors au tombeau où son émotion se manifeste pleinement. Là encore, il partage la commune condition de tous les hommes. Jésus est ému aux larmes. Il pleure son ami mais peut-être aussi sur le drame d’une humanité qui se soumet à la loi de la mort….

Laissant les témoins de la scène dans leur sidération Il leur demande soudainement de retirer la pierre qui ferme le tombeau. Et, comme Il a déjà relevé le paralytique, comme Il a déjà purifié le lépreux, comme il a pardonné le pécheur, voilà qu’il appelle avec autorité son ami à sortir du tombeau : « Lazare, viens dehors ! ». Jésus appelle son ami à la vie. Il l’appelle à une vie nouvelle, à jamais nouvelle. Une vie relevée par la présence, par la puissance de la Parole de Dieu. La « résurrection » de Lazare n’est pas un « miracle ». C’est un « Signe », c’est une renaissance, c’est… un « baptême ». Jésus fait remonter de la mort définitive son ami. « Déliez-le et laissez-le aller » dit-il alors… Jésus le libère, nous libère. Il nous invite à ne pas nous laisser lier par les liens de la peur, du doute, du désespoir, de tous ces liens de mort qui enferment notre humanité pensée dans les seules limites que nous lui donnons. En présence de Jésus, c’est à une autre vie que nous sommes appelés, à une vie autre, pensée, et vécue, dans une dimension toujours plus grande que nous ne pouvons l’imaginer. « Déliez-le et laissez-le aller ». Cette parole de Jésus est, et doit être pour nous comme un appel continu à la vie. Pour nous-mêmes, mais aussi, pour l’humanité toute entière. Jésus nous invite, à notre tour, à libérer les hommes de tout ce qui entrave leur humanité, de tout ce qui les aliène, de tout ce qui les empêche de se tenir debout, vivants, libres. Libérés de leur peine, de leur misère, de leurs doutes, de leur manque d’espérance en leur dignité.  Libérés, aussi, de leur culpabilité, de leur péché. C’est là notre espérance. C’est là… la Gloire de Dieu plus fort que la mort.

Père Stéphane-Jacques Ruchon,                                                                                                                      Curé de la Paroisse Saint-Marcellin-Champagnat en Tricastin

 

Évangile du 5ème dimanche de carême:                                                                                    « Je suis la résurrection et la vie » (Jn 11, 1-45)