Église de Saint-Restitut – Monographie du tableau : La mort de saint Joseph

L’église de Saint-Restitut possède dans son patrimoine un tableau ancien dont le temps avait effacé les contours et terni les couleurs. Une restauration a été effectuée au cours de l’hiver 2020 avec l’aide de la Mairie et de la Paroisse Saint-Marcellin Champagnat en Tricastin, avec le concours financier de différents organisme, fondation et associations (Département de la Drôme, Fondation du Crédit-Agricole, Société de Sauvegarde des Monuments Anciens de la Drôme et Association des Amis de l’église de Saint-Restitut) et avec le support de la Conservation du Patrimoine de la Drôme. La restauration a été réalisée par l’atelier Laurent Gerest à Crest.

 

  1. Caractéristiques générales du tableau et état au moment de la restauration

 

Le tableau, qui est une huile sur toile, mesure (hors cadre) 1,63 mètres de hauteur par 1,15 de largeur. Il était très endommagé notamment dans sa partie inférieure où la toile s’était détachée de l’encadrement.

Le cadre, en bois simple de couleur vert foncé, était en très mauvais état du fait de l’humidité et des attaques d’insectes xylophages. Le châssis, lui aussi très endommagé, avait perdu sa fonction première d’assurer la tension la plus optimale possible de la toile. La toile était déformée dans sa partie inférieure. Une pièce de papier avait été collée lors d’une restauration ancienne sur toute la largeur du tableau pour masquer différents dégâts et recouvrait, ainsi, une partie de la couche picturale d’origine.

La préparation de la toile et la couche picturale présentaient de grands signes de faiblesse notamment une très mauvaise adhérence entre les différentes strates due à la présence d’humidité dans l’église, aux importantes déformations de la toile et au vieillissement naturel de l’œuvre.

Le vernis était assombri et s’était oxydé avec le temps. Il avait pris une couleur jaune-rousse.

Le tableau avait déjà été restauré, sans que nous en connaissions la date, et un repeint de couleur noire était visible sur toute la largeur de la partie inférieure du tableau.

Une demande de restauration avait été faite en décembre 1969 mais les travaux n’avaient pas été réalisés.

L’état général du tableau demandait une restauration rapide qui heureusement a pu être menée à bien. Les quelques photos ci-dessous dnas la galerie illustrent cet état dégradé

 

  1. Origine du tableau et hypothèses

 

Son origine est inconnue et les résultats sur les recherches concernant cette origine sont bien maigres. Le tableau n’est mentionné dans aucun ouvrage récent sur l’église notamment les livres des chanoines Vernet (1932) ou Béchet (1977). Il ne fait partie ni de l’inventaire des biens religieux réalisé en 1905 dans l’église de Saint-Restitut ni de celui des mobiliers de l’église fait en 1806 par le curé Solier de l’Estang. Ce dernier mentionne trois tableaux – les âmes du purgatoire, sainte Anne et le Rosaire – mais pas celui de la Mort de saint Jospeh. Nous sommes conduits à faire des hypothèses sur son origine. Par exemple, un tableau appartenant à l’une des églises de la région, volé ou vendu au moment de la révolution et redonné sous forme de legs à l’église de Saint-Restitut au XXe siècle. Les recherches faites dans les archives de la commune et aux Archives Départementales de la Drôme n’ont pas permis de confirmer cette hypothèse.

Le fait qu’il ne soit pas mentionné dans les ouvrages de 1932 et 1977 ne veut pas dire qu’il n’était pas présent dans l’église à ces époques puisque les deux ouvrages ne sont pas dédiés à son mobilier. Par contre son absence des inventaires de 1905 (bien que l’exhaustivité des inventaires réalisés à cette occasion reste très imparfaite) et surtout de celui de 1806, qui lui cite individuellement les tableaux présents dans l’église à cette date, pourraient permettre de conclure que le tableau n’est arrivé dans celle-ci qu’au XXe siècle.

 

En ce qui concerne la datation, là aussi les informations manquent. Comme la plupart des tableaux d’église, il n’est pas signé.

Le thème de la Mort de saint Joseph est aussi souvent appelé la Bonne mort : Joseph meurt avec, à ses côtés, le Christ et la Vierge Marie qui l’accompagnent dans son dernier voyage vers la vie éternelle. Cette mort, couronnement d’une vie exemplaire, rappelle à tout fidèle les conditions à remplir pour obtenir la grâce d’être accueilli par Dieu dans l’au-delà.

Le thème a été repris, dans de grandes compositions, par les peintres à partir du XVIIe siècle. L’hypothèse d’un tableau réalisé au XVIIe siècle, ou plus vraisemblablement au XVIIIe siècle à partir d’un modèle plus ancien est donc plausible mais rien ne permet de l’affirmer avec certitude. Certains détails permettent toutefois de se référer à cette période notamment la composition traditionnelle du tableau ou bien les couleurs employées pour la tunique du Christ, pour le voile de la Vierge Marie ou encore pour la couverture du lit de saint Joseph.

D’autres détails mériteraient une analyse plus approfondie pour trouver des similitudes avec des tableaux réalisés à la même période notamment l’étonnante table de chevet de saint Joseph (avec ses défauts de perspective, ses pans de velours vert qui pourraient aussi rappeler le XIXe siècle et ses pieds curieusement décorés) ou encore la boule de son lit.

Une fois de plus, les informations manquent pour conclure.

 

  1. Iconographie du tableau

Quatre personnages ou groupe de personnages sont généralement représentés dans les tableaux de la Mort de saint Joseph : le Christ, la Vierge Marie, Joseph et un groupe d’angelots. Certains tableaux montrent également Dieu le Père et la colombe du Saint-Esprit. A Saint-Restitut, ces deux derniers ne sont pas présents.

Joseph est le personnage central du tableau. Il est alité, revêtu d’une chemise blanche qui laisse apparaître son épaule droite et une partie de sa poitrine. Sa tête repose sur un épais oreiller et ses bras sont croisés sur son ventre. Il semble que Joseph vive ses derniers instants. La grande majorité des représentations de la mort de Joseph le montre vivant au seuil de la mort. A côté du lit, est placée cette curieuse table de chevet où sont déposés un sablier, une cuillère et, détail inattendu, ce qui semble être une bouteille de sirop.

Le Christ est le deuxième personnage du tableau. Il est assis sur le lit et regarde Joseph. Sa main droite esquisse un geste de bénédiction. Il est vêtu d’une grande tunique de couleur rouge avec un manteau bleu foncé sur ses épaules et sur ses genoux. Ses cheveux sont bouclés et il porte, sans surprise, une barbe.

Le troisième personnage est celui de la Vierge Marie. Elle se tient auprès de son époux avec un visage empreint de compassion. Sa main droite est pointée vers le ciel et un angelot situé en haut à gauche du tableau.  Elle montre à son mari la vie céleste qui l’attend. La Vierge, assise sur le lit, est revêtue d’un ample manteau d’une couleur bleu azur qui lui couvre également la tête comme il est d’usage dans ces représentations.

On trouve enfin un groupe de quatre angelots. Le premier en position centrale va accompagner Joseph vers les cieux. L’angelot porte la couronne destinée à Joseph dans son accession à la vie éternelle. Il s’agit d’une couronne de lauriers, ou couronne triomphale, destinée au défunt et symbole de victoire et de récompense. Deux autres angelots assistent à la scène et le quatrième, derrière la Vierge Marie, porte un cierge dans sa main gauche.

 

  1. Images de la restauration de quelques détails (voir la galerie ci-dessous)